Préambule p1

8/7/20243 min read

Petits gaçons assis par terre représentés à l'infini face au mot mad world
Petits gaçons assis par terre représentés à l'infini face au mot mad world

... car le monde était immense et il s'offrait à nous

And I find it kind of funny, I find it kind of sad The dreams in wich i'm dying are the best i've ever had Tears for fears, Orzabal Roland, Mad world

C'était la fin des années 80, nous n'avions pas encore 18 ans et nous n'étions ni préoccupés par nos études, ni préoccupés par notre avenir ... car le monde était immense et il s'offrait à nous.

Il était encore explorable, exploitable, modifiable. La guerre froide et les scléroses de nos parents n'étaient pas nôtres, nous nous sentions libérés et il suffisait simplement pour que la paix perdure que les russes aiment aussi leurs enfants...

Sting chantait, en effet, à l’époque que la seule chose qui puisse nous sauver d'un risque de guerre nucléaire mondiale était le fait que.... les russes aiment aussi leurs enfants. Toute notre éducation était imprégnée par la guerre froide (guerre sans soldats apparents) que l'on croyait perdue par les russes jusqu'à ce que Poutine nous révèle sans honte sa vérité... [ndlr: texte écrit en 2021 en pensant à l'intervention des hackers russes lors de l'élection de Donald Trump, et non pas à la tentative d’invasion de l’Ukraine].

Nous pouvions marcher dans la rue reliés par un casque à une bulle de musique qui transformait l'ailleurs en foyer... En même temps que le walkman, une nouvelle forme de mobilité était née!

Il n'y avait plus de peur de l'autre, car nous avions joué tous les rôles à coup de dés et nous avions imaginé tout un champ de mondes virtuels dans des jeux de rôles de plus en plus réalistes. Nous n'imaginions pas que ces jeux allaient influencer les créateurs de comics, livres, films, séries, jeux vidéos et… marketing metaverses!

Au lycée, nous découvrions de nouveaux langages, presque basiques, proposés par Thomson, je crois, et notre gouvernement. Nous pensions que ces langages informatiques allaient simplifier le monde et nous unifier sans que nous n’ayons à porter un quelconque uniforme. Les peuples allaient enfin se réunir dans une nouvelle tour de Babel, une tour numérique!

Pourtant, une vague froide m'avait aussi traversé dès la première écoute de Joy Division, Bauhaus (le groupe), U2 (seulement le premier album), The human league, Tears for fears, Talk Talk, ...

Je me sentais souvent comme l'enfant de la couverture de The hurting, seul dans un monde ayant déjà perdu tout son sens.

Mes croquis devenaient de plus en plus sombres comme la nuit de Frank Miller à Gotham qui réinventait les codes du thriller en même temps que notre mythologie (la ville remplaçait le monde). La ville s'était séparée de sa banlieue et nous commencions aussi à sentir la violence et le communautaire monter dans les ghettos français. Je me rappelle encore mon année à vivre juste à côté de la zup (Zone Urbaine Prioritaire) de la muraille de Chine à Saint-Etienne et la police déjà dépassée.

Ce n'est qu'en 1994, lorsque qu'un autre mur **est brisé, que le soleil se remet à briller. La chute du mur de Berlin symbolise alors la victoire de la démocratie du capitalisme. Ce renouveau libère aussi mes dessins.

Les beaux-arts et le design dissipent alors mes derniers doutes. J'y découvre le Modernisme, la Gestalt (la théorie de la forme) et le Bauhaus (le mouvement, pas le groupe).

Avec la Gestalt, j'entrevois alors un levier d'action qui change ma vision du monde : la forme au service du sens. Le design viendra bien tous nous sauver...

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Illustration qui s'inspire directement de la pochette de The Hurting de Tears for fears
(1983, photo de Peter Ashworth).